De nos jours encore, l'annonce d’une grossesse dans le monde du travail reste un sujet sensible qui peut amener à de nombreuses discriminations envers les salariées. Pour lutter contre ce phénomène, malheureusement encore trop présent, les femmes enceintes bénéficient de droits qu’il est important de connaître.
Tout d’abord, une salariée enceinte n’a pas l’obligation d’informer son employeur de son état de grossesse, que ce soit au moment de l’embauche, pendant sa période d’essai ou lors de son contrat de travail. L’employée enceinte peut annoncer sa grossesse à son patron lorsqu’elle le désire. Toutefois, tant qu’une femme n’a pas annoncé sa grossesse, prouvée par un certificat médical, à son employeur, celle-ci ne peut pas bénéficier des droits légaux protégeant les femmes enceintes. Des dispositions protectrices s’appliquent également pour les femmes qui adoptent un enfant ainsi que pour les employées qui bénéficient d’une assistance médicale à la procréation.
Quelles sécurités pour une collaboratrice enceinte ?
Une salariée ayant informé son employeur de sa grossesse bénéficie de plusieurs protections spécifiques. Premièrement, contre le licenciement, ou la rupture de la période d’essai. Durant toute la durée de sa grossesse, pendant son congé de maternité, lors de congés payés pris immédiatement après le congé maternité ainsi que pendant les dix semaines après la fin de ces périodes, l’employée ne peut pas être licenciée. Il en est de même pour les femmes en congé d’adoption.
Néanmoins, le Code du travail précise que cette protection ne concerne pas les licenciements pour faute grave ou motif économique, non liés à la grossesse ou au parcours d’adoption de la salariée. Un licenciement qui interviendrait pour l’une de ces deux raisons ne pourrait toutefois pas prendre effet pendant le congé maternité ni pendant les quatre semaines suivantes. Enfin, si une femme enceinte se fait licencier par son employeur alors qu’elle ne l’avait pas averti de sa grossesse, le licenciement peut être annulé si la salariée lui fait parvenir un justificatif médical sous quinze jours.
En outre, une salariée enceinte bénéficie d’une autorisation d’absence pour assister aux examens médicaux obligatoires dans le cadre de sa grossesse et de son accouchement. Même chose pour les femmes bénéficiant d’une assistance médicale à la procréation. De plus, le conjoint, mari ou personne liée à la salariée par un PACS peut également bénéficier d’une autorisation d’absence pour assister à trois de ses examens médicaux obligatoires dans le cadre de la grossesse ou du parcours d’assistance médicale à la procréation, et cela sans entraîner de diminution de salaire.
À noter également que de nombreuses conventions collectives mettent en place des aménagements d’horaires de travail pour les femmes enceintes ou les salariées qui reviennent de leur congé de maternité. Pour en savoir plus, rapprochez-vous de la convention collective de votre entreprise.
Quelles protections pour la santé ?
Certaines tâches ne sont pas compatibles avec le bon déroulement d’une grossesse et/ou de l’allaitement, notamment lorsque la salariée est au contact de substances toxiques. Ainsi, selon les conclusions du médecin du travail, la salariée peut provisoirement changer d’emploi si le poste qu’elle occupe est trop risqué pour sa santé ou celle de l’enfant. Le ministère du Travail, de l’Emploi et de l'Insertion précise sur son site que ce reclassement ne doit pas engendrer de diminution de la rémunération de la salariée. Elle pourra retrouver son emploi initial dès que son état de santé le lui permettra.
L’article R1225-4 du Code du travail a fixé la liste des risques aux substances et situations suivantes :
- Agents toxiques pour la reproduction de catégorie 1 ou 2
- Produits antiparasitaires dont l’étiquetage indique qu’ils peuvent provoquer des altérations génétiques héréditaires ou des malformations congénitales et produits antiparasitaires classés cancérogènes et mutagènes
- Benzène
- Plomb métallique et ses composés
- Virus de la rubéole ou toxoplasme
- Travaux en milieu hyperbare, dès lors que la pression relative maximale excède la pression
- Situations d’intervention définie IA, soit 1,2 bar
Une femme enceinte travaillant de nuit peut également être affectée à un poste de jour jusqu’au congé prénatal si cette dernière en fait la demande ou si le médecin juge ce changement nécessaire. Une affectation à un poste de jour une fois le congé de maternité terminé ne peut être effectué que si la médecine du travail juge le travail de nuit incompatible avec la santé de l’employée.
Dans les deux cas vus précédemment, si l’affectation à un autre poste n’est pas possible, alors le contrat de travail de la salariée est suspendu. Dans ce cas, elle bénéficie d’une garantie de rémunération comprenant une allocation journalière versée par la Sécurité sociale ainsi qu’un complément de son employeur. Cette suspension du contrat de travail est possible jusqu’au début du congé de maternité et peut éventuellement durer jusqu’à un mois maximum après le retour de la collaboratrice au travail.
Quels droits après l’accouchement ?
Lorsque la salariée revient au travail après la fin de son congé de maternité, elle bénéficie du droit à l’allaitement. En effet, l’employée peut allaiter son enfant pendant ses heures de travail, et ce jusqu’à un an après la naissance du nouveau-né. Cette dernière a le droit à une réduction de son temps de travail dans la limite d’une heure par jour, répartie en deux périodes de trente minutes : une dans la matinée et une pendant sa période de travail de l’après-midi. Si la collaboratrice ne trouve pas d’accord avec son employeur, alors cette période intervient au milieu de chaque demi-journée de travail, précise le site du service public. Il n’est toutefois pas prévu que ces temps de pause consacrés à l'allaitement soient rémunérés, sauf si des dispositions conventionnelles le prévoient.
De plus, si l’employeur met à disposition de ses employées un local dédié à l’allaitement, le temps de pause est réduit à vingt minutes. Qu’il soit à l’intérieur ou proche des locaux, cet espace doit “respecter des normes strictes en matière de santé et de sécurité au travail”. À noter qu’une entreprise de plus de 100 salariées peut être mise en demeure d’installer un tel local au sein de son établissement, ou à proximité.
Quelles garanties salariales ?
Afin d’éviter que le congé de maternité ou le congé d’adoption ne vienne entraver l’évolution salariale d’une salariée, il existe une garantie de “rattrapage salarial”. Celle-ci intervient “selon des règles différentes selon qu’il existe, ou non, un accord collectif prévoyant de telles garanties”, indique le Code du travail. Si des augmentations de salaire ont été décidées ou versées pendant l’absence de la salariée, alors un rattrapage salarial doit être appliqué à son retour dans l’entreprise, que ce soit à la fin du congé de maternité ou d’adoption, ou si la collaboratrice a poursuivi avec un congé parental d’éducation.
Toutefois, le Code du travail précise que “seules les augmentations intervenues pendant le congé de maternité ou d’adoption sont prises en compte, et non celles intervenues pendant le congé parental”. De plus, une salariée qui reprend le travail après son congé de maternité a droit à un entretien avec son employeur afin d’aborder ses perspectives d’évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d’emploi. Un document est rédigé à la suite de cette entrevue professionnelle et une copie est remise à la salariée.
Quid des congés payés ?
Une salariée qui revient de congé de maternité a bien évidemment droit à ses congés payés annuels, “quelle que soit la période de congé payé retenue, par accord collectif ou par l’employeur, pour le personnel de l’entreprise”. Concernant les femmes dont le congé de maternité est intervenu au moment de la prise des congés payés, elles peuvent toutefois prendre leurs congés payés à leur retour dans l’entreprise, et ce, même si la période pour poser les congés a expiré. Ce dispositif concerne également les salariées en retour d’un congé d’adoption.
Dans quels cas faire valoir ses droits auprès du défenseur des droits ?
Le Défenseur des droits est une institution indépendante qui existe en France depuis 2011. Celle-ci a pour mission de “veiller au respect des droits et des libertés des citoyens”. Ainsi, le Défenseur des droits est également qualifié pour agir en cas de discrimination en lien avec la grossesse d’une salariée. En effet, si une employée enceinte est victime de discrimination de la part de son employeur, elle doit dans un premier temps saisir la cellule de signalement ou le référent discrimination de son entreprise. Si cela n’aboutit pas, la collaboratrice peut se rapprocher du Défenseur des droits.
Cette institution, qui regroupe plus de 700 agents dans tout l’hexagone, va alors tenter de trouver un terrain d’entente et peut aller jusqu’à faire des observations devant le tribunal, si la femme discriminée a porté plainte.
Pour saisir le Défenseur des droits, il vous suffit de remplir ce formulaire en ligne ou d’envoyer un courrier (sans affranchissement) à l’adresse indiquée sur le site. Si vous souhaitez rencontrer l’un des agents, vous pouvez également vous rapprocher d’un des délégués de l’institution. Ils sont plus de 500 dans toute la France.